Un miroir distendu de la société
Entre 1870 et 1918, l’œuvre des caricaturistes se montre indissociable de son contexte de production : une société en pleine mutation, marquée par l’influence de la bourgeoisie. La caricature en révèle les contradictions à travers une mise en scène de l’univers domestique. La caricature de mœurs devient l’une des manifestations les plus éclatantes de la société de la Troisième République, mais aussi le portrait en creux du lectorat amateur de presse satirique.
La représentation des mœurs conjugales en est l’un des thèmes de prédilection. Les titres de presse de la Belle Epoque, comme Le Courrier français ou Le Rire, ainsi que les recueils de caricatures, regorgent de dessins reflétant les tensions au sein du couple selon un regard résolument misogyne. Ce thème rencontre un succès constant, et ce même durant la Première Guerre mondiale.
La bourgeoisie est également une cible de choix des caricaturistes. Une série de vignettes de Charles Liozu (1866-1948) dans Le Champenois amusant dénonce ainsi la cupidité d’un bourgeois-grenouille, qui refuse la main de sa fille à l’élu de son cœur pour la vendre à un crapaud plus fortuné.
Les lieux de sociabilité – théâtres, opéras et champs de course – forment une source d’inspiration inépuisable des caricaturistes. Forain s’inspire fréquemment des danseuses de l’Opéra dans ses œuvres et sillonne les quartiers de la capitale pour représenter les Parisiens les plus modestes, tout comme la bonne société fréquentant l’hippodrome de Longchamp. A Reims, les ridicules de la bourgeoisie assistant aux représentations du Grand Opéra font le bonheur de Tristan de Pyègne, qui se délecte de leurs mœurs en Une de La Vie Champenoise illustrée.