La caricature de 1870 à 1918
Une société sous le feu du crayon
La caricature avant 1870, un art en pleine affirmation
Dérivé de l’italien caricatura, du latin caricare signifiant charger, le terme caricature est complexe à définir, en raison de la fréquente confusion avec le dessin satirique ou le dessin d’humour. Si ce procédé n’est pas systématique, la caricature se traduit par une déformation des corps, l’exagération et la disproportion de certains membres, qui frappent le regard et suscitent un effet comique ou dénonciateur du sujet représenté. L’inventivité visuelle de la caricature inclut également des dispositifs tels que l’allégorie ou le zoomorphisme, par lequel la figure humaine est assimilée à un animal. Ces dispositifs visent à railler, dénoncer et ridiculiser la cible représentée.
L’histoire de la caricature évolue également de manière constante au fil des siècles : la caricature telle qu’elle est aujourd’hui comprise n’apparaît en effet qu’à compter du XVIe siècle. A partir de cette époque, la caricature convoie un message à caractère religieux, sociétal ou politique et les artistes s’orientent vers la représentation de stéréotypes et de figures reconnaissables : souverains, artistes et hommes politiques sont dépeints avec férocité.
La Monarchie de Juillet (1830-1848) se caractérise par un essor sans précédent de la caricature en France, lié à la multiplication des titres de presse qui diffusent à large échelle ces images. Charles Philipon, chef de file de ce phénomène, fonde La Caricature en 1830 puis Le Charivari en 1832, dont les caricatures lui attirent les foudres de la justice. Lors de son procés, il crée l'un des exemples les plus célèbres de caricature politique avec sa croquade du roi Louis-Philippe métamorphosé en poire.
L’éphémère Seconde République (1848-1852) voit le retour d’une caricature politique avant que le Second Empire (1852-1870), marqué par le retour à une stricte censure, institutionnalise le genre : le portrait-charge apparaît comme un signe de distinction pour les grandes figures artistiques et littéraires de ce régime. A la veille de 1870, la caricature s’établit comme l’un des supports privilégiés par les dessinateurs, un art en quête de légitimation, tout comme la manifestation éclatante d’une société de l’image en pleine construction.