Pierre Minet (1909-1975)
Portraits
Comédien éphémère
A l’occasion d’une conférence intitulée « Alfred Jarry créateur de mythe » le 21 mai 1946 à la Chambre de commerce de Reims, Pierre Minet s’illustre dans un grand rôle théâtral. En effet, la conférence organisée par Emmanuel Peillet, professeur de philosophie au lycée de Reims, s’interrompt bien vite pour laisser place à une troupe éphémère de comédiens qui joue alors l’Ubu cocu. Sous le masque d’Ubu, créé par Claude Laloux, élève aux Beaux-Arts de Reims, se cache Pierre Minet. Ce masque s’ouvre sous le nez en un puissant porte-voix dissimulé par la moustache de telle sorte que la voix de l’apprenti comédien est terrifique. Pierre Minet a particulièrement mis au point la voix ubique, ayant connu Max Jacob (RM 1214), qui savait, dit-on, « parler Ubu ».
Biographie
Né le 4 juin 1909 à Reims, Pierre Minet est un écrivain et poète français. Tout comme Rimbaud, il fuit à Paris pour y accomplir son destin. Grâce à ses connaissances, il participe à la création de la revue Le Grand Jeu. Son œuvre se compose de titres à forte valeur autobiographique comme L'Homme Mithridate (1928) ou Histoire d'Eugène (1930) mais on le connait aussi pour sa poésie à travers le recueil Circoncision du cœur (1928). Il décède le 16 septembre 1975 à Paris, à l’âge de 66 ans.
Fraternité rémoise
De nature sociable, Pierre Minet est proche d’un groupe de jeunes catholiques engagés, appelé « cercle de Saint-Michel ». Royaliste, le jeune provocateur ose, lors du 1er mai 1925, distribuer L’Action Française (un journal royaliste) à l’arrière d’une manifestation de travailleurs. Alors qu’il se fait prendre à partie par les manifestants, il est abordé par René Daumal et Roger Gilbert-Lecomte. Le culot du jeune Pierre impressionne les deux Phrères simplistes qui deviennent peu à peu ses héros. Une forte amitié se développe entre le Phrère Fluet (nom simpliste de Pierre Minet) et ses ainés.
Vie parisienne
Pierre Minet est avant tout un enfant rebelle à la recherche de liberté. Son rêve le plus cher est de partir pour Paris, ville de tous les possibles. Il s’y rend une première fois alors qu’il n’a que 16 ans et vit chez d’anciens amis du « cercle Saint-Michel ». Renvoyé à Reims quelques mois plus tard à cause de son comportement inconséquent, Pierre Minet y retournera en 1926. Il devient alors une sorte de poète vagabond et erre dans les rues de Paris, vivant aux crochets de ses amis et nombreuses connaissances.
Amitié et Grand Jeu
On peut compter parmi ses proches les poètes Max Jacob, André Rolland de Renéville mais aussi l’éditeur Léon Pierre-Quint à qui il présente ses amis simplistes. Cette mise en relation est le début d’une entreprise qui donne le jour à la revue Le Grand Jeu en 1928. Pierre Minet ainsi que plusieurs de ses connaissances, dont les illustrateurs Artür Harfaux et Joseph Sima, participent à l’enrichissement de la revue. Il fait la rencontre de son premier amour, Lilian Fisk, peintre américaine de vingt-cinq ans son ainée. Pour elle, il murit, s’éloigne de ses Phrères et de sa vie de vagabond. Dans La Défaite, ouvrage publié en 1947, il raconte l’histoire de la révolte de sa jeunesse.
Un ami fidèle
Il prend également ses distances avec Roger Gilbert-Lecomte à cause de sa toxicomanie. En décembre 1943, alors qu’il apprend que Roger est au plus mal, il ne le rejoint pas tout de suite mais à l’annonce de sa mort, les remords le gagnent. En 1968, son ami n’est considéré que comme un obscur poète connu des seuls initiés. Avec l’avocat Roland Dumas, il est l’instigateur du recours en justice visant à faire publier les textes de Roger Gilbert-Lecomte contre la volonté de la légataire universelle du père du poète. Pour cela, il gagne à sa cause des personnalités telles qu’Arthur Adamov ou André Breton mais aussi le ministre des Affaires culturelles de l’époque, André Malraux. Ensemble, ils remportent ce procès et peuvent ainsi publier la correspondance mais aussi les œuvres complètes de Roger Gilbert-Lecomte et lui permettre d’échapper à l’oubli.