La caricature et le dessin de presse sportifs
Thématiques sportives
Au début du XXe siècle, le premier véritable titre local de presse sportive, l’Echo sportif du Nord-Est, est fondé. L’émergence de champions régionaux et leur popularisation permettent aux caricaturistes de les « croquer » de manière plus ou moins réaliste.
A la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, la pratique sportive se popularise et les premières compétitions font leur apparition, dans des disciplines aussi différentes que la vélocipédie et la course à pied. Des caricaturistes suivent ce mouvement et représentent les athlètes de manière humoristique dans les journaux. La Première Guerre mondiale marque un coup d’arrêt des manifestations sportives. Elles reprennent dès la fin du conflit.
Le sport féminin et les responsables de sociétés sportives rémoises ne sont pas oubliés et sont représentés dans la presse locale.
Le football est le thème privilégié de la caricature dans la presse locale rémoise tout au long du XXe siècle. Dans L'Echo sportif du Nord-Est, la plupart des grands matchs de football donnent lieu à des caricatures signées A. Dumont. Après la Deuxième Guerre mondiale, les supporters du Stade de Reims prennent l’habitude de retrouver leurs joueurs favoris, ainsi que les entraîneurs et les présidents du club, « croqués » par Guy Perpère. Ce dernier est né le 22 novembre 1936 à Reims. Il est décédé le 28 juin 2018. Il est le fils d'un des membres fondateurs du Stade de Reims, Lucien Perpère. Celui-ci occupait le poste d'avant-centre après avoir joué pour la Société Sportive du Parc Pommery. Guy Perpère illustre dès la fin des années 1950 des articles pour le journal L’Union. Pour les grands matchs du Stade de Reims, ses dessins prennent une place majeure sur la première page du journal. Il a également illustré les programmes des matchs Allez Reims. (Source : Biographie de Guy Perpère, In Stade de Reims, une équipe de légende / Jean-Michel François. DRG 219).
Le thème du sport dans la caricature et le dessin de presse est aussi utilisé dans une autre finalité : illustrer un « combat politique ». Dès le milieu des années 1850, l’illustration et plus particulièrement la caricature, prend une place importante dans la presse satirique. Le dessin devient le support privilégié pour « tourner au ridicule » des personnalités politiques. Le sport, notamment la boxe et l’escrime, sert à mettre en scène de manière caricaturale des opposants politiques. Certains journaux privilégient le dessin comique au discours politique. De plus, le dessin s’affiche en première page pour interpeller les passants dans la rue ou devant les kiosques de journaux.
Juste avant la Première Guerre mondiale, la création du parc Pommery par le marquis Melchior de Polignac, président de la Maison de Champagne Pommery, permet à la ville de disposer d’un véritable écrin pour les sportifs. La venue du président de la République, Raymond Poincaré, en octobre 1913, puis l’organisation de grandes manifestations notamment en l’honneur des membres du Comité International Olympique en juin 1914, font de ce parc un lieu incontournable pour l’aristocratie locale et nationale. En atteste ce dessin de presse paru dans le journal Gil Blas du 29 juin 1914 (source www.retronews.fr).
Victor Eugène Géruzez dit Crafty
A la fin du XIXe siècle, un dessinateur lié à la ville de Reims connait une certaine renommée. Crafty, de son vrai nom Victor Eugène Géruzez, est né à Paris le 24 mai 1840. Il décède à Saint-Martin-de-Nigelles (Eure-et-Loir) le 26 mai 1906. Son père, Nicolas Eugène Géruzez, est né à Reims le 6 décembre 1799 et mort à Paris le 29 mai 1865. Il était professeur à la Sorbonne, historien de la littérature et critique littéraire.
Comme son père, Crafty est un homme de lettres, mais sa notoriété lui viendra de ses talents de dessinateur humoristique. Il devient célèbre grâce à la publication de plusieurs albums dans lesquels il compile ses dessins sportifs. Il est particulièrement spécialisé dans les illustrations de livres et de journaux sur les chevaux et la chasse.
Crafty
L'Exposition des humoristes sportifs
Le premier grand titre national de presse sportive est le journal L’Auto, créé en 1900 par Henri Desgrange. La caricature y trouve rapidement sa place. Le 10 février 1928, l’Exposition des humoristes sportifs est présentée à la librairie de L’Auto à Paris. Elle est organisée par le journal sportif en collaboration avec le dessinateur Georges Schira (1898-1950), qui collabore de 1923 à 1941 avec le journal. L’exposition présente plus de deux cents caricatures, aquarelles ou dessins sportifs.
« Le public sportif ne manquera pas de visiter cette exposition, qui est une nouveauté en son genre.
L’ensemble, aussi original que varié, fera mieux connaître ceux qui, habituellement,
illustrent les colonnes sportives des journaux parisiens » (L’Auto du 10 février 1928).
En février 1932, l’exposition se tient dans le hall d’entrée du Palais des Sports de Paris. Désormais, un comité est constitué pour valider les trois cents œuvres exposées. La 11ème (et dernière ?) édition a lieu à partir du 15 janvier 1939. La plupart des grands noms de la caricature sportive y exposent leurs œuvres.
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Paul Ordner (1901-1969) : il est initié au dessin de presse par son frère Raymond Ordner. Il est très vite attiré par le domaine sportif et illustre à partir de 1931 des affiches et des programmes de manifestions cyclistes organisées au Vélodrome d’Hiver (Paris). Il œuvre également dans les disciplines de la boxe, du tennis, du rugby ou du patinage. Sa rencontre avec Henri Desgrange, directeur du Tour de France et du journal sportif L’Auto, lui permet de réaliser des reportages sur la grande course cycliste. Il publie aussi des dessins politiques dans les années 1930 en réaction à la montée du nazisme. Ses prises de position et ses caricatures d’Hitler l’obligeront à se cacher pendant l’occupation allemande durant laquelle il sera activement recherché. A partir de 1950, il se consacre exclusivement au domaine sportif (pour France Football, L’Equipe, Miroir-Sprint et le Miroir des sports notamment).
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Bib : de son vrai nom Georges Breitel (1888-1970), il dessine pour beaucoup de magazines et de journaux, dont L’Auto (1910 et 1926).
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Siro : de son vrai nom Pierre Rollot (1914-2000), il est l’une des figures incontournables du dessin omnisport. Il collabore avec beaucoup de journaux et il apprécie tout particulièrement dessiner les champions cyclistes lors des Tours de France.
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Lucien Vincent (1905-1998) : il signe ses dessins Luc Vincent et couvre pour la presse les principaux événements politiques, judiciaires et sportifs. Ses dessins sont publiés notamment dans L’Auto, le Miroir des Sports ou encore L’Equipe.
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Pellos : de son vrai nom René Pellarin (1900–1998), il est lui-même sportif et participe aux Jeux olympiques d’Amsterdam de 1928 au sein de l’équipe suisse de hockey-sur-gazon. Il est surnommé le « roi des dessinateurs sportifs ». Il travaille pour L’Auto de 1932 à 1941. Il acquiert une grande notoriété après la Deuxième Guerre mondiale quand il collabore avec L’Equipe (1947-1953), L’Officiel de la boxe (1948-1949), Miroir Sprint (1949-1971), ou encore le Miroir du cyclisme (1959-1981), notamment en couvrant le Tour de France. En parallèle à ce travail, il mène une riche carrière dans la bande dessinée (Pieds nickelés, Futuropolis,…).
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Ralph Soupault (1904-1962) : caricaturiste et illustrateur, ses convictions politiques extrémistes font qu’il est condamné en février 1947 pour collaboration. Ses dessins sont notamment publiés dans Charivari.
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Charles Wall : dessinateur pour Charivari, La Dépêche de Paris et Dimanche illustré, il caricature les sportifs pendant l’entre-deux-guerres.
Emery Kelen (1896-1978) : dessinateur d’origine hongroise, ses dessins sont publiés dans Le Miroir des Sports et L’Auto dans les années 1920. -
Charles Genty (1876-1958): il est champion amateur de boxe française. Il illustre des journaux satiriques (Le Rire, Le Charivari…), mais aussi d’actualité (La Vie parisienne…) et sportifs (Le Miroir des Sports).
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Albert Guillaume (1873-1942) : après être passé par l’école des Beaux-Arts de Paris, il s’oriente dès 17 ans vers le dessin humoristique pour La Vie parisienne, Gil Blas, L’Illustration, Le Monde illustré, Sport comique, L’Assiette au beurre, Le Charivari, Le Figaro, l’Excelsior...
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Jean-Raoul Chaurand-Naurac (1878-1948) : il est spécialisé dans les peintures, affiches et dessins de chevaux.
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Fabio Lorenzi : illustrateur et peintre italien, il s’attache plus particulièrement à des sujets féminins.
Parmi ceux-ci, on retrouve notamment :
Le journal L’Equipe et L’Equipe magazine permettent à un grand nombre de dessinateurs de s’exprimer. On peut également citer Blachon (1955-....) pour L’Equipe magazine de 1985 à 2000, Soulcié , Lefred-Thouron (1962-....), Robert Dero (1920-2000) qui collabore à L’Equipe durant quarante ans, Bernard Chenez (1946-....). Et aussi Guillaume Bouzard pour le magazine So Foot.
- Sources :
- Dico Solo : plus de 5.000 dessinateurs de presse et 600 supports en France de Daumier à l'an 2000
Par François Solo ; assisté de Catherine Saint-Martin et Jean-Marie Bertin. - Vichy (Allier) : Aedis, 2004. (M 64552) - Paul Ordner, dessinateur sportif
Entretien de Jean-Etienne Huret avec Philippe Aurousseau in Le magazine du bibliophile, n°126-127, été 2016 (PER VI 647).