Le style de Georges Sogny
A travers ses milliers de couvertures, Sogny se construit une identité graphique : un usage récurrent de la couleur jaune, une recherche de la dynamique à travers les scènes de bagarre, une inclination pour les plans de dos, un attachement pour les meurtriers en costard, un goût prononcé pour les masques et le mystère, une omniprésence du tueur caché.
Un autoportrait
Le Polar en images : ciné, séries, BD, illustrations
Georges Sogny (1896-1962)
Une première carrière artistique
D’ascendance marnaise, Georges Sogny naît à Epernay en 1896 et y demeure jusqu’à la fin de la Première Guerre mondiale. Démobilisé en 1919, il s’installe à Chartèves (Aisne) dans le village d’origine de sa mère. Il y habitera jusqu’à sa mort, à l’exception de la période de l’Occupation où il séjourne chez sa sœur dans le Limousin. Au début des années 20, Sogny commence son apprentissage de la sculpture, puis de la peinture. Engagé dans une carrière artistique, il répond à diverses commandes d’œuvres, notamment de monuments aux morts de la Grande Guerre.
Le tournant de l’illustration
A 40 ans, il réoriente sa carrière vers l’édition et devient illustrateur de littérature populaire en particulier pour le compte de la maison Ferenczi dont les fascicules, issus de ses nombreuses collections, saturent le marché. Jusqu’à sa retraite en 1958, Sogny produira 1920 illustrations de couverture en 22 ans de carrière. Seule la Seconde Guerre mondiale ralentit sa cadence de travail ; la famille Ferenczi en raison de ses origines juives ne pouvant plus publier. Sogny se rabat sur la bande dessinée et travaille pour Le Journal de Mickey qui paraît toujours en zone libre. Il s’attelle à la version française des aventures du marin Don Winslow (Bernard Tempête) jusqu’en 1944 et publiera environ 300 planches. Le peu de temps de loisirs qu’il lui reste, Georges Sogny le consacre à des parties de pêche sur la Marne.
Entre roman sentimental et roman policier
La production de Sogny se divise en deux.
D’une part, il dessine les couvertures de fascicules de littérature à l’eau de rose aux titres éloquents tels que Le dancing du malheur, L’heure des sanglots, Le mariage de Ginette, L’enfant d’un soir ou encore Vendue… au printemps de sa vie (publiés dans les collections : Le Petit roman ; Le Petit livre ; Le livre favori ; Bibliothèque romanesque).
Tandis que l’autre partie de sa production, Sogny la voue au roman policier, essentiellement chez Ferenczi. Avant la guerre, il illustre les couvertures de la collection Le Petit roman policier ; mais suite à son exode dans le Limousin, il est remplacé par Calvo (1892-1957).
A la fin de la Seconde guerre mondiale, il officie pour une multitude de collection : Mon roman policier; Le Verrou ; Mysteria. Cette dernière accueille les rééditions des aventures de Tigris, héros de l’entre-deux guerres inventé par Marcel Allain (1885-1969), l’un des deux pères de Fantômas; et les enquêtes de La Mandragore, personnage d’Henry Musnik (1895-1957), graphomane aux vingt pseudonymes.
Le pulp à la française
Si la littérature populaire policière francophone des années 50 est abondante, elle offre peu d’intrigues originales ou de personnages remarquables ; la plupart des auteurs reprenant soit le cadre des romans de détective américains (les pseudonymes s’anglicisent), soit l’archétype du début de siècle du génie du mal.
D’où la nécessité d’une couverture attractive pour se faire remarquer du lecteur !
À noter que Sogny travaille aussi pour la collection Le Bandeau noir, éditée par la S.E.P.E., pour le compte de laquelle il réalise la couverture de la réédition en 1948 du premier roman de Léo Malet (1909-1985), Johnny Métal (1941) écrit sous le pseudonyme de Frank Harding. En 1952, il conçoit la couverture de L’île de la mort, le nouveau Malet (alias Louis Refreger).
Galerie
Pour en savoir plus
L’indispensable Georges Sogny, de la sculpture au dessin populaire de Philippe Aurousseau, première monographie consacrée à cet illustrateur méconnu du polar. Qui plus est agrémenté d’une préface de l’ami Jean Solé.