Les archives du Collège de 'Pataphysique
La 'Pataphysique
La 'Pataphysique
Qu'est-ce que la 'Pataphysique ?
Le terme 'Pataphysique est popularisé par Alfred Jarry dans la pièce Ubu Cocu, composée en 1898. Le personnage principal, le Père Ubu, se définit en tant que docteur de cette discipline : « La pataphysique est une science que nous avons inventée et dont le besoin se faisait généralement sentir »1. Jarry précise sa conception de la ‘Pataphysique dans l’ouvrage Gestes et opinions du docteur Faustroll, édité en 1911, qui en renferme plusieurs définitions : cette dernière apparaît tour à tour comme « la science du particulier », « la science des solutions imaginaires, qui accorde symboliquement aux linéaments les propriétés des objets décrits par leur virtualité », et plus largement comme « la science » elle-même2.
Reims et le Collège de 'Pataphysique
C'est à Reims, dans la salle de conférences de la Chambre de Commerce, située dans l’Hôtel Ponsardin, que la première représentation mondiale d’Ubu Cocu a lieu en 1946. Mise en scène par Emmanuel Peillet (1914-1973), professeur de philosophie au lycée de Reims, la pièce rencontre un vif succès.
Société de « recherches savantes et inutiles », le Collège de ‘Pataphysique est fondé le 11 mai 1948, par le Docteur Irénée-Louis Sandomir, premier Vice-Curateur, et Jean-Hugues Sainmont (un des pseudonymes d’Emmanuel Peillet) ayant pour but la diffusion et la promotion de la ‘Pataphysique. Les divers travaux et écrits des membres du Collèges sont rassemblés dans des publications internes.
Parmi eux, nous retrouvons des écrivains, des peintres, des musiciens... dont Fernando Arrabal, Enrico Baj, Jean Baudrillard, René Clair, Marcel Duchamp, Max Ernst, Jean Ferry, Joan Miró, Pierre Mac-Orlan, Jacques Prévert, Raymond Queneau, Man Ray, Siné, Boris et Ursula Vian, Umberto Eco ou encore Paul-Émile Victor.
Un moment en sommeil (1975-2000), le Collège est toujours actif. Son travail de publication se poursuit et, parallèlement à la revue, d’autres supports sont produits sous différentes formes. Livres, papillons, cartes postales... viennent enrichir les collections pataphysiciennes (Voir les publications du Collège).
Les Archives du Collège de ‘Pataphysique (documents administratifs, correspondance, photographies...) sont collectées, classées et conditionnées par Raymond Fleury, l'archiviste du Collège, jusqu'en 2014 (date du don à la bibliothèque municipale de Reims). Il conserve l'ensemble de ces pièces dans le Cabinet des archives, situé au premier étage de sa maison, à Vrigny (Marne).
Note :
1.Extrait de Ubu cocu : restitué en son intégrité tel qu'il a été représenté par les marionnettes du Théâtre des Phynances. Cinq actes / Alfred JARRY. Paris ; Genève : Éditions des Trois collines, 1944 Voir les exemplaires de la bibliothèque
2.Extrait de Gestes et opinions du Docteur Faustroll Pataphysicien / Alfred JARRY. Paris : E. Fasquelle, 1911. Voir les exemplaires de la bibliothèque
Sélection de documents sur la 'Pataphysique
Les 'Patarchives
Les 'Patarchives
Archiviste du Collège, Raymond Fleury gère avec minutie et rigueur les archives du Collège de 'Pataphysique, appelées les 'Patarchives. Il appose sur chaque document le tampon « Archives de l’Organon » et apporte une note explicative si nécessaire. Il conditionne consciencieusement tous ces éléments en les regroupant par thèmes. Trois grands ensembles composent les 'Patarchives : des boîtes d'archives contenant des documents administratifs du Collège, des grands classeurs emplis de documentation sur les 'Pataphysiciens et des petits classeurs constitués de photographies et de correspondances entre les membres du Collège.
En parallèle, Raymond Fleury crée une bibliothèque composée de 7938 livres estampillés « Bibliothèque de l’Organon », de 121 titres de revues et de 4436 dossiers de documentation générale. Les ouvrages abordent différents domaines comme la littérature, la géographie, la médecine, l’histoire ou Reims et sa région. Les écrits des Optimates tiennent une place importante dans cette collection. Les dossiers, classés par ordre alphabétique, traitent de sujets variés : astronomie, botanique, cinéma, religion, philosophie, santé, peinture… Ils rassemblent des coupures de presse, des livrets et des photocopies de documents et témoignent de la diversité des centres d'intérêt des 'Pataphysiciens.
Ces archives sont riches par la variété et la rareté des documents qui les composent. Les documents officiels, de la carte de membre jusqu’aux diplômes, tiennent une place importante. Les fonds photographiques, quant à eux, donnent un aperçu d’événements majeurs immortalisés par Jean Weber, photographe du Collège : banquets, cérémonies... La correspondance nourrie par divers membres du Collège offre un aperçu plus intime sur leurs relations intellectuelles et amicales.
Le travail de publication du Collège tient une place importante. Manuscrits, maquettes, tapuscrits, correspondances avec l’imprimeur ou bons à tirer avec annotations... sont classés dans les dossiers des ‘Patarchives consacrés aux publications 'pataphysiciennes. Cela atteste du travail de recherche des 'Pataphysiciens, tant sur le contenu que sur l’aspect physique des documents. L’identité graphique et visuelle 'pataphysicienne se décline sur une large variété de supports et s'appuie sur des figures et symboles fondateurs comme la gidouille ou le Père Ubu. L'utilisation ludique de la langue, caractéristique de cette identité, transparaît dans la création typographique, les calligrammes et les jeux de mots.
Portraits de donateurs
Raymond Fleury naît en Normandie en 1920. Après la guerre, il s’installe dans la Marne, à Sézanne, avant d’intégrer la Chambre de commerce de Reims.
C’est à la bibliothèque Carnegie, lors d’une exposition de ses photographies en mars 1951, qu’il rencontre Emmanuel Peillet : cette rencontre sera un bouleversement, ou mieux une nouvelle vie. Désormais, Raymond Fleury sera la cheville administrative du Collège de ‘Pataphysique.
Dès lors, il s’occupe des relations extérieures du Collège avec les abonnés, les imprimeurs, les services postaux, bancaires… A ce titre, il accumule des milliers de documents, appelés les 'Patarchives. Son précieux travail est reconnu par sa nomination en mai 1957 à la tête de la Pro-Administration et l’érection de sa demeure de Vrigny comme Organon Exécutif du Collège de ‘Pataphysique. Cette fonction d’Administrateur-Opitulateur Général avec rang de Provéditeur lui est conservée jusqu’à nos jours.
Scientifique curieux, auteur d’une remarquable thèse démontrant que « La trichonomase urogénitale est une maladie vénérienne », Rafaël de Luc entra au Collège de ‘Pataphysique seulement huit mois après la création de ce dernier en 1948.
Il occupa différentes fonctions collégiales. On le voit brandir le gonfanon de l’Ordre de la Grande Gidouille lors de l’acclamation du baron Mollet, nouveau Vice-Curateur, on a pu l’entendre lors de ses conférences de Régent de la Chaire de Nécrobiologie expérimentale & d’Amnésie appliquée. Il fut enfin Provéditeur Diaetète , et à ce poste, conseilla judicieusement la marche collégiale avant, pendant et après l’Occultation.
Il fit don à la bibliothèque municipale de Reims d’une grande partie des archives du Satrape Latis, étant son co-exécuteur testamentaire. Il donna en outre, le moment venu, à la même institution ses archives et sa bibliothèque. Ces deux dons sont venus enrichir les collections de la bibliothèque Carnegie, faisant d’elle un des hauts lieux de la mémoire pataphysique mondiale.
Lors de la première mondiale d’Ubu Cocu en 1946, œuvre alors méconnue d’Alfred Jarry, à Reims, Henri Bouché interprète sur la scène de la salle de spectacle de la Chambre de commerce Quatrezoneilles, un des trois serviteurs ou Palotins du Père Ubu.
Il est de la génération de fondation du Collège de ‘Pataphysique dont les abondantes racines de création s’étendent dans le sous-sol crayeux de la Champagne. Dans ce fameux Collège, il occupa avec sérieux comme il se doit, plusieurs charges pour atteindre le Provéditoriat des Affaires Animales & Végétales, auquel est rattachée la prestigieuse Administration des Quinconces. Il fut en outre nommé Satrape. Ces différentes fonctions prouvent son inlassable implication dans la diffusion de la Science pataphysique. Il s’impliqua grandement auprès de Sa Magnificence Opach pour l’Occultation du Collège en 1975, puis également lors de sa Désoccultation en l’an 2000.
Une grande partie de sa bibliothèque personnelle rejoint lors de son décès en 2014 les fonds de la bibliothèque municipale de Reims.