A recollection : Stroboscopy-EP/Loom-EP/Trans-lines appointment-LP/Live Rome 92, Lyon 93/and more... / Deity Guns

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Deity guns

Edité par Ici d'Ailleurs - 1991

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Avis des lecteurs

  • Mon simple avis 5/5

    Pour mémoire, Deity Guns (groupe dont on retrouvera plus tard des membres dans Bästard et Zëro), c'est essentiellement deux albums. "Stroboscopy" en 1991 sur Black & Noir, (feu)le label de leur potes des Thugs et "Trans-lines Appointment" en 1993 sur "Big Cat", le label de Jim Thirlwell (Monsieur Foetus). Les Lyonnais avaient mis leur destinée entre de bonnes mains. "Stroboscopy", c'est la genèse, le poids des influences encore palpable. Sonic Youth en première ligne. Ils en ont bouffé de cette comparaison mais ils s'en sortent bien. Une influence essentiellement dans le jeu des deux guitares en mode tronçonneuse stridente alors qu'on se prend des tombereaux de batterie dans la tronche et que la basse ne fait pas dans la figuration elle non plus. Si pour l'étranger averti, ce jeune Deity Guns fougueux n'avait rien de révolutionnaire, le français averti était aux anges. Et les autres hagards. Sonic Youth et des tas de groupes bruyants américains les poussaient au cul certes, mais dans la France du punk alternatif, c'était déjà ça de pris. Deity Guns était parmi les premiers à poser les bases du noise-rock en France ou au moins à le faire connaître au-delà d'un petit cercle d'initiés. Plus de vingt ans plus tard, c'est toujours avec un plaisir non dissimulé qu'on se prend "Kurious... here today", déclenchant les hostilités après le "Fire" à la fin du sample initial, les lamentations en boucle se demandant "How many Circles" pour nous faire tourner bourrique ou la décharge d'"Optical Burst", mis en boite par Gilles Théolier (à qui on doit le groupe Hydrolic Systems et le brûlant single sur Black & Noir). Au départ prévu pour un simple 45 tours, Deity Guns a fait le forcing auprès des frères Sourice pour sortir un 6 titres qui doit son nom aux nombreux stroboscopes que le groupe utilisait sur scène. Deity Guns entend marquer les esprits. Ça se fera au-delà de toutes leurs espérances. Pour "Trans-lines Appointment", Deity Guns s'exile à New-York, rencontre leurs maîtres (Wharton Tiers et Lee Ranaldo) et passe dans une dimension supérieure. Fini la puissance brute et le bruit de masse. Les Lyonnais élague leur son. Le rythme ralentit, élargit son champ d'action. Deity Guns dompte l'énergie qui bouillonne en eux, la torde, joue avec la tension et l'explose en vagues déferlantes, garde le rock au centre du débat tout en lui faisant subir outrages et sévices. On ne va pas repasser en détail les neuf titres de cet album, juste retenir que "Trans-lines Appointmen"t est, sans vouloir en faire des tonnes dans l'exégèse, un disque angulaire de la scène française (on pourrait aller au-delà des frontières mais ça va devenir compliqué), un mélange de l'urgence du rock et d'une approche expérimentale, ne privilégiant jamais l'un au détriment de l'autre mais une musique toujours tendue vers une émotion, quelle qu'elle soit. Cet album est l'aboutissement parfait d'une démarche pour aller sans cesse de l'avant, prendre des risques, transcender ces influences de base pour trouver son propre terrain de jeu. Un album achevé en février 1993 et sorti dans la foulée, le groupe se séparant juste après, en décembre de la même année. Mais "A Recollection" ne propose pas que ces deux plats principaux. A la fin de chacun de ces deux albums prenant place sur deux CDs différents, Deity Guns a sorti les trésors de guerre. Deux titres figurant sur des compilations. La fameuse "Serial Killers vol. 1" avec l'excellent "Vacuum Tubes" et la compile "Passionnément" et le titre "Appointment in Sète" ou comment cauchemarder au pays de Brassens. Ils ont également eu la bonne idée de mettre la meilleure reprise du monde, j'ai nommé "Smile "de "The Fall", que le zine "Abus Dangereux" avait sorti mine de rien sur leur petit bout de CD 3 pouces. Autre mets important de leur courte discographie, le EP 4 titres "Loom", qui fait la jonction entre "Stroboscopy" et "Trans-lines Appointment". Des titres qui hésitent encore entre la puissance, la distorsion rougeoyante (The Opposition Act), le noyau mélodique captivant (Shaman) et des ambiances plus tordues mais toutes aussi palpitantes (She loomed). Le troisième CD est une affaire de concerts, effluves soniques de l'équipe lyonnaise. "A Recollection" propose deux concerts. Rome, le 4 avril 1992 et le tout dernier, à la maison, le 3 décembre 1993. Celui de Rome est de loin le plus intéressant. Que ce soit pour la qualité de l'enregistrement ou pour l'inédit offert, le très bon "Anyway". Et le "Extra love on a // world" du 45 tours de la Bande à Bonnot qui est en fait exactement le même morceau, enregistré au même endroit, la version du 45 commençant juste un peu plus tôt avec un faux départ. Mais à Lyon, on sent poindre, derrière le son médiocre, toute l'intensité et la passion que drainait Deity Guns. Encore plus quand on sait que c'est le tout dernier. Une heureuse initiative du label d'Ici d'Ailleurs, même si on a déjà tout et qu'on se sent d'un coup encore plus vieux, ne serait-ce que pour le livret intérieur et le texte hommage de Lee Ranaldo / article de presse / photos / posters / affiches d'une autre époque dont l'écho garde toute sa force même en 2021. Pour les plus assidus, sachez que des titres de Deity Guns, enregistrés avant la sortie du 1er album du quatuor, viennent d'être rassemblés sur un vinyle intitulé "Proto larsen" sur "Larsen Recordz". À travers ce LP, c'est l'occasion de découvrir des versions différentes de cinq des huit titres qui composeront "Stroboscopy" en 1991.

    Nicolas Bucheron - Le 11 mai 2023 à 07:38